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Marco Polo – Pietragalla

14 janvier 2009
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marcopolo

 

Mêlant la danse (classique, hip hop, contemporain, arts martiaux), le chant en live et l’art numérique à travers le film d’animation, Pietragalla Compagnie nous offre une mise en scène artistique ambitieuse.

 

Dans un monde futuriste, où réel et imaginaire s’entremêlent, un homme, Marco Polo, va tenter de retrouver ce chemin qu’il a déjà parcouru et ce monde qu’il a autrefois découvert. Il évolue entre rêve et réalité, monde concret et immatériel, selon le jeu ambigu du vrai et du virtuel.

Les danseurs se révèlent époustouflants. Ces 20 virtuoses du hip-hop, de la capoeira et des arts martiaux virevoltent comme autant de messagers d’un monde inconnu autour du héro, Marco Polo. Le décor, qui repose sur un fil d’animation créé exclusivement pour cette pièce, crée l’illusion parfaite. Le tout sur une bande son originale : trio d’opéra, le dernier album de Christophe, Prodigy, The Chemical Brothers.

 

Vingt virtuoses du hip-hop et des arts martiaux virevoltent comme autant de messagers de ces mondes inconnus autour du héros Marco Polo (Julien Derouault). Prisonnier d’abord, puis libéré et agressé par le monde qu’il découvre, il sera guidé tout au long de son périple par l’image d’une femme : la dame blanche (Marie-Claude Pietragalla).

 

 

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Photos © pascalelliott.com

 

 

Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault ont chorégraphié une danse d’avant-garde mêlée au jeu stupéfiant des images d’animation sur une bande son éclectique (Christophe – The Chemical Brothers – Prodigy …).
Cet ensemble musical composé par Armand Amar s’étend des mélodies traditionnelles à des tonalités contemporaines, passant de l’électro à un trio d’opéra qui assure l’union du récit chanté en italien, en persan et en mandarin.

Marco Polo nous transporte dans un univers onirique où à la présence sur scène de la danse, de la musique et du chant comme expressions premières de l’homme, s’ajoute l’image d’animation, spectre déformant et contemporain de notre imaginaire. La chorégraphie déplace les codes de la comédie musicale en donnant une nouvelle place au chant et en renforçant celle du corps. Ici ce sont les corps qui racontent l’histoire, le mouvement qui est narration. Un spectacle éblouissant qui fusionne l’image d’animation, le chant, le hip-hop avec le ballet moderne et classique, orchestré par une chorégraphie où rivalisent la précision des gestes et l’énergie incessante des corps.
Le premier acte nous entraine au départ d’une Venise engloutie par les eaux vers le désert aride de la Chine impériale. Au fond de cette ancienne Atlantide les corps des danseurs sont si fluides qu’on les dirait liquides. Ils rebondissent, se jouent de la gravité et s’entrechoquent en sauts périlleux, tentant de résister en vain au naufrage du bateau.

Marco Polo rescapé découvrira un peuple étrange : les « esprits de la Terre ». Ces « danses premières » sont les vibrations incessantes et ancestrales des énergies de l’homme, un rite d’initiation, un Sacre du printemps. Le héros se confronte alors au Grand Khan, entouré par ses guerriers, dans une épreuve suprême. Dans le deuxième acte, son voyage l’extirpe du passé pour le plonger dans les profondeurs d’un monde futuriste et incertain : une jungle urbaine. Marco Polo se libère ici de ses derniers liens et affronte ses peurs. Les danseurs à la gestuelle agressive, s’enivrent du son saturé sur le rythme incessant d’une chorégraphie de l’effort.

Cette rencontre est replacée dans l’imaginaire au moyen de l’art le plus ancien mais aussi le plus moderne : la danse. Car là où les langues sont parfois un barrage, le langage du corps nous apparaît être l’expression la plus universelle.
Le mouvement devient source de vitesse et d’accélération pour les uns, affolement et déséquilibre pour les autres. Les personnages tantôt zombis tantôt humanoïdes exposent la performance de leur corps.
Hors du temps, l’épilogue se fait par un pas-de-deux lyrique et sensuel (Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault); la réunion de cet esprit libre et de sa muse, sous une pluie de pétales. « Un message d’amour universel, de communication et de dialogue » Le mélange de styles et d’époques de ce « conte moderne » symbolise la rencontre des mondes auxquels Marco Polo a été confronté, mais plus encore la rencontre de l’Orient et de l’Occident, une quête d’identité et une meilleure connaissance de soi à travers l’autre.

Dans ce chaos, une femme dans un tutu noir sur pointes combat par un jeu de pirouettes étourdissantes le grondement affolé des danseurs hip-hop. Cette chorégraphie finit sa course folle dans des images d’animation, où se dessine une production de masse robotisée, qui capture les danseurs. Projeté dans une cité moderne, Marco Polo se perd dans l’anonymat de la foule. Les danseurs se dédoublent et s’entrechoquent. Ils sont happés dans une irrésistible course contre le temps; peur du vide et fuite de l’instant…

 

La critique

 

La compagnie Pietragalla flirte avec le grandiose en nous livrant un Julien Derouault, alias Marco Polo… Bien plus qu’à la hauteur !

Cette  fois, c’est Julien Derouault que la Compagnie Pietragalla hisse au sommet en lui offrant d’incarner un Marco Polo qui lui va, si bien ! Car enfin, il se meut comme un délice et nous scotche de grâce virile de bout en bout…

Une figure christique apparaît, mystique et douloureuse comme la Venise engloutie dans laquelle elle émerge. Du Christ sur une croix noyée dans l’Atlantide à l’homme enrichi qui peut se consacrer en conscience à l’amour, Marco Polo va se libérer peu à peu, et devenir, au fil d’une quête initiatique non consensuelle qui ose s’emparer et de l’espace, et du temps. L’espace, Marco Polo le retraverse bel et bien, depuis Venise jusqu’à la Chine impériale, mais en ajoutant la découverte d’une jungle urbaine saturée de dépravation et de violence. Ici, les zombis, humanoïdes et restants d’humains s’agitent terriblement, dénonçant l’éventuelle résultante d’une modernité qui pourrait altérer l’humanité. Figure Baudelairienne égarée dans l’anonymat de la multitude, Marco Polo est l’homme qui défie le temps à mesure qu’il se déploie au travers de deux mondes pour lesquels l’écart géographique se creuse et se révèle en temporalité. Si l’homme se perd entre un monde oriental aux traditions archaïques contre un monde occidental en perdition futuriste, il y a cette Dame Blanche (Marie-Claude Pietragalla) pour guider son périple, qui agit en muse ou divine Vénus et parvient, au trait d’union d’amour capable de réunir ces deux mondes,  jusque dans le cœur de Marco Polo.

Les variations musicales qui accompagnent ce conte résolument moderne sont le fait d’Armand Amar. Et l’on sort admiratif ! Il a fallu bien de l’audace pour oser mêler à l’électro pointue d’un Prodigy les mélodies psychédéliques de The Chemical Brothers, mais plus inattendu surtout, les chants en live d’un trio d’Opéra qui assure le récit en italien, en persan, en mandarin. Le pari était osé et l’on se réjouit que cet assortiment musical s’accorde et mette ainsi en exergue une faculté commune à des genres que tout oppose pourtant dans l’imaginaire commun : susciter des émotions fortes, profondes, transcendantales !

Si notre imaginaire trouve un relais avant-gardiste en l’art vidéo d’inspiration manga déployé en fond de scène, il reste que l’abstraction domine où la part belle est laissée à l’expressivité des corps, là où le mouvement des corps, la danse donc, alimente forcément l’imaginaire. Sur scène, les danses et les corps se croisent, se mêlent, et s’isolent volontaires ou aspirés, toujours en fluidité. La danse classique, le Hip Hop et les arts martiaux se rencontrent dans Marco Polo, où l’on perçoit que la  contemporanéité naît de l’harmonie d’un mélange qui exalte les forces de chacun. De tous ces rythmes et mouvances contraires, de ces sons saturés et du bombardement d’images et de tableaux auxquels le spectateur est soumis, Julien Derouault et Marie-Claude Pietragalla sont arrivés à une création où la cohérence est maintenue tout du long par la fluidité d’un ensemble. Si la performance du Julien Derouault, pour le moins fascinante, est indiscutable, ce sont tous les corps du spectacle, jusqu’aux spasmes violemment contemporains qui les agitent dans le second tableau, qui s’imposent en forces liquides, éminemment gracieuses.
Marco Polo est un grand spectacle tout public, où l’énergie, la grâce et la modernité cohabitent d’une manière inouïe !

 

Christine Sanchez

 

 

Conception, chorégraphie et mise en scène : Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault.

Avec Marie-Claude Pietragalla, Julien Derouault, Aurore Di Bianco, Aragorn Boulanger, Romuald Brizolier, Daravirak Bun, Guillaume Chan ton, Ahmed Derhamoune, Jean Dutelle, Poundo GOMIS, Cédric Gueret, Aurélien Kairo, Nam Kyung Kim, Brice Larrieu, Alex Martin, Philippe Mésia, Miguel Ortega, François Przybyski, Adèle Carlier, Salar Aghili, Xin Xin.

 

http://www.pietragalla.com

 

Du 6 au 15 Mars 2009
Les jeudi et vendredi à 20h30, samedi à 15h et 20h30 et le dimanche à 16h

 

Prix des places: de 20 euros à 89 euros. Réservation impérative par téléphone au 0892 68 36 22 ou sur Internet sur le site de la Fnac.

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Palais des Congrès

Porte Maillot

75017 Paris

Métro Porte Maillot

 

 

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